jueves, 1 de febrero de 2018

Amantes de mis cuentos: Sombras del ayer (Versión francesa)





Des ombres de l'hier
 

Par un pur hasard -je veux le croire- j'ai rencontré au marché celui qui était mon premier et unique fiancé, l'Antonio, deux ans plus vieux que moi; il en a donc maintenant soixante-dix. Je ne l'ai pas reconnu à première vue. Cela fait beaucoup de temps depuis que je l’avais vu me tourner le dos à la fin de la rue du Pósito.

Sa présence après tant d'hivers m'a frappée après m’avoir rappelé avec amertume le motif de ces adieux. Il avait  laissé ma meilleure amie enceinte. Il est venu me dire qu’on l'obligeait à se marier et qu'ils quittaient  le village. Plus jamais je ne l’ai revu. Jusqu'à présent.

Après la surprise -je ne sais pas si agréable ou non- il m'a invitée à prendre un café sur la place. J'ai accepté en pensant qu'il n'était pas convénient qu'une femme adulte, comme moi, le gifle en pleine rue. C'est ce que m'aurait conseillé ma mère défunte, Dieu ait son âme, mais je n'ai pas son caractère. Et je suis ici, très bien assise après avoir lissé ma jupe, à l'attente de ce qu'il ait à me dire.

Lui, très hypocrite, a commencé par me dire qu’il me voyait comme toujours. Oui, avec cinquante ans et encore trente kilos de plus, je lui ai répondu. Il n’a pas réagi à ma moquerie. Il s’est souvenu du pot-au-feu castillan que faisait ma grand-mère -qui repose en paix elle aussi- avec sa farce spongieuse et le chou-fleur cuit si délicieux. Il me regardait comme si j'étais l'un de ces ingrédients qui le faisaient soupirer. Je me suis émue.

Je continuais assise très droite sur ma chaise en entendant le bruit de ses mots et en observant un moineau avec un morceau de pain plus grand que lui; à un léger mouvement de mes jambes, l’oiseau eut peur et s’envola sans lâcher sa proie. Je me mis à l’écouter. Maintenant, ce vieux ridé, qui fut mon fiancé dans sa jeunesse, me racontait qu’il était veuf depuis six mois , qu’ils n'avaient pas eu d'enfants et que cette grossesse avait été une fausse alarme.

La mère de ma meilleure amie était astucieuse! Et je l'ai vue au bal, animant l'Emeterio, le sot du village, à me faire danser, ce que j'ai fait parce qu’il était gentil avec moi; à la fois elle poussait mon fiancé à danser avec sa fille. Quelques années plus tard, je lui fermais les yeux sur son lit de mort  et elle me demanda pardon. Je ne savais pas de quoi elle me parlait.

Ma noce fut gâchée et ma mère, qui repose en paix, sans dire un mot  -je l’en remercie-, prit mon trousseau et le rangea dans l'armoire de la grand-mère, peint de vert clair, et le ferma à clef. Je ne sus jamais la cachette …

- Eh, Antonia! dit-il, tu ne m'entends pas ?

- Excuse-moi, je ne te suivais pas...

- Je te disais que…

Si mon oncle Alberto apparaissait sur sa jument rusée, dont il ne descendait jamais, même s’il pleuvait, s’il neigeait ou il grêlait, et me voyait seule, écoutant ce "connard", comme il l'a toujours appelé, il me prendrait par le bras et d’un coup il m’installerait à sa croupe. Mais personne de ma famille ne vit pour le mettre à sa place.

Comme je me souviens de son premier baiser! Et du deuxième, et du troisième … Tous subsistent à travers le temps. Je n'ai jamais oublié les messes dominicales dans la paroisse de Saint-Pierre , qui n'existe plus, quand sa jambe frôlait la mienne. Je l’ai regardé avec dissimulation et l'ai trouvé appuyé sur sa canne, en train de philosopher …

- Maintenant, Antonia, nous sommes dans le troisième âge.

-Oui. On appelait ainsi la vieillesse avant- et j'ai papilloté des yeux comme quand j’étais jeune et je voulais lui faire une blague.

-Sais-tu ? L'arthrose est l'un de mes maux, me dit- il comme s'il voulait m’inspirer de la pitié.

Je vois venir au loin une personne connue. C'est l'Emeterio qui marche en silence,  un pied devant l'autre sans perdre l'équilibre. Les années ne semblent pas passer pour lui. Il me regarde avec étonnement, glisse son regard vers l'Antonio, crache et dit  lentement:

-Je viens d’arracher les mauvaises herbes dans le verger, et je t’apporte quelques tomates en cadeau -jetant  un coup d'oeil au compatriote de la tête aux pieds, il  exclama-. Que la végétation est mélangée!!!
Il vient à côté de moi, il me tend son bras que j'ai pris en le remerciant et il dit, en argumentant comme s’il était un grand savant: “la vie tourne lentement par ici et tout intrus me parait hostile”.

Traducida por: 

María Ramírez Sánchez nació en Melilla y con 8 añitos se fue a vivir a Oujda, una ciudad del entonces protectorado francés del norte oriental de Marruecos, a muy pocos kilómetros de la frontera con Argelia. Con 21 años se vino a Madrid, donde ha trabajado haciendo traducciones francés-español hasta su jubilación, y donde ha formado una bonita familia de la que se siente muy orgullosa.

Un millón de gracias María.


Sombras del ayer





Por puro azar —quiero creer— tropecé en el mercado con el que fuera mi primer y único novio, el Antonio, dos años mayor que yo, por lo que ahora tiene setenta. No le reconocí a bote pronto. Ha pasado mucho tiempo desde que le había visto dándome la espalda al final de la calle del Pósito.

Su presencia después de tantos inviernos me golpeó al recordar con amargura el motivo de aquella despedida. Dejó embarazada a mi mejor amiga. Vino a decirme que le obligaban a casarse y que se marchaban del pueblo. Nunca más volví a verlo. Hasta ahora.

Tras la sorpresa —no sé si agradable o no— me invitó a tomar un café en la plaza. Accedí pensando que no era propio de una mujer adulta, como yo, asestarle una bofetada en plena calle. Es lo que me hubiera aconsejado mi difunta madre, que en gloria esté, pero no tengo su carácter. Y aquí estoy, muy bien sentada después de alisar mi falda, a la espera de lo que tenga que decir.

El muy hipócrita comenzó con que me veía igual que siempre. Sí, con cincuenta años y treinta kilos más, le respondí. No le afectó la sorna. Recordó el cocido castellano que hacía mi abuela —que en gloria también esté— con su relleno esponjoso y la sabrosa coliflor en su punto. Y me miraba como si fuera uno de aquellos ingredientes que le hacían suspirar. Me emocioné.

Yo seguía sentada muy recta en la silla oyendo el runrún de sus palabras y observando a un gorrión con un trozo de pan más grande que él, que a un ligero movimiento de mis piernas, asustado, salió volando sin soltar su presa. Puse atención. Ahora, aquel arrugado viejo que de joven fue mi novio, me contaba que hacía seis meses había enviudado, que no tuvieron hijos, que aquel embarazo fue una falsa alarma.

¡Qué lista la madre de mi mejor amiga! Y la vi en el baile animando al Emeterio, el tonto del pueblo, a que me sacara a bailar, lo que hice por lo bueno que era conmigo, a la vez que invitaba a mi novio a bailar con su hija. Años más tarde me tocó cerrarle los ojos y me pidió perdón. No supe en aquel entonces a qué se refería.

Cuando mi boda se fue al garete, mi madre, que en paz descanse, sin emitir sonido —cosa de agradecer— tomó mi ajuar y al «sobrao». Todo lo fue colocando con detalle en el armario de la abuela, el pintado de verde claro, y lo cerró con llave. Nunca averigüé el escondite…

—¡Eh, Antonia! ¿Es que no me oyes?

—Disculpa, se me fue el santo al cielo.

—Te decía que…

Si mi tío Alberto apareciera sobre su taimada yegua, de la que no se bajaba, así lloviese, nevase o apedrease, y me viera sola, prestando oídos a lo que hablaba aquel «huevón», como siempre le llamó, me tomaría del brazo y con un enérgico impulso me subiría a la grupa. Pero nadie de mi familia está entre los vivos para ponerlo en su sitio.

¡Cómo recuerdo aquél primer beso! Y el segundo, y el tercero… Todos perduran a través del tiempo. Nunca olvidé las misas dominicales en la parroquia de San Pedro —ya no existe— cuando su pierna rozaba la mía. Miré con disimulo y lo encontré apoyado en su bastón, filosofando…

—Ahora, Antonia, estamos en la tercera edad.

—Sí. Así llamamos a la vejez de antes. —Y parpadeé como cuando era joven y quería gastarle una cuchufleta.

—¿Sabes? La artrosis es una de mis tantas peplas —comenta como si quisiera inspirar lástima.

Veo venir a lo lejos una figura conocida. Es el Emeterio que silencioso y tardo, camina poniendo un pie delante del otro sin perder el equilibrio. Los años no parecen pasar por él. Al llegar me mira asombrado, desliza su torva mirada hacia el Antonio, escupe y declara con parsimonia:

—Vengo de desyerbar en la huerta, y te traigo de regalo unos tomates —echándole un vistazo al paisano de la cabeza a los pies, exclamó—. ¡Hay que ver lo promiscua que es la vegetación!

Se coloca a mi vera, me tiende su brazo, que tomé agradecida, y argumentando como si de un gran sabio se tratase, soltó: «La vida rueda con serenidad por estos lares y todo intruso se me hace hostil.»



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